Carnet de bord – Décembre 2023

15 décembre 2023

Nourrir les poules, surveiller les moutons et les équidés, pailler les buttes de cultures dans la serre, aller en forêt pour couper du bois de chauffage : les activités extérieures sont réduites en cette saison, d’autant plus que la météo est très humide ! On est bien au coin du feu, au bureau où il y a toujours tant à faire ; le fait marquant du mois écoulé a été la rédaction des rapports scientifiques 2022, que vous pouvez consulter sur notre site.

Voici un bref résumé des informations essentielles.

Résilience de la ferme

Comment créer une ferme qui soit capable de nourrir la communauté locale, même en cas de crise (énergétique, climatique, sociale…) ? Voici la question qui sous-tend tous nos programmes de recherches. Nous travaillons l’autonomie et la résilience à tous niveaux : fertilité (disponibilité de la matière organique pour les paillis et le compost), eau, semences, outils (manuels, en traction animale, sur batteries…), énergie (solaire, éolienne, bois)…

L’objectif est de penser la ferme comme un organisme vivant capable de s’adapter aux changements. L’omniprésence des arbres fruitiers augmente la capacité de la ferme à résister, entres autres, aux aléas climatiques. Nous avons pu l’observer durant la longue sécheresse de l’été 2022 : l’herbe était grillée partout, mais les haies et les arbres restaient verts et les forêts-jardins luxuriantes. Nous avons pu, comme chaque année, laisser nos animaux tout l’été dans les herbages en les nourrissant de bois-fourrage lorsque l’herbe n’était plus disponible.

La mini forêt-jardin

Pour la septième année consécutive, l’étude technico-économique de la mini forêt-jardin donne des résultats encourageants. Pour une surface totale de 320 m2, la valeur des récoltes s’est élevée à 5 521,78 €, la charge de travail étant de 62,22 heures sur 12 mois. Vous trouverez l’ensemble des données dans le rapport. Année après année les résultats sont cohérents, bien que des personnes différentes gèrent cette forêt. Malgré son implantation dans un contexte peu favorable à l’arboriculture (fond de vallée froid et humide, gels tardifs fréquents), les valeurs récoltées varient relativement peu d’une année sur l’autre, dans des contextes climatiques forts différents. Le potentiel économique de la forêt-jardin reste à démontrer dans des contextes variés, mais au Bec Hellouin, cette première étude dépasse nos espérances !

Les céréales jardinées

Dans une perspective d’autonomie, cultiver chez soi, à la main, ses céréales semble un rêve inatteignable ! Pourtant, les techniques de jardinage du blé et d’autres céréales sont attestées depuis l’antiquité. Nous cherchons depuis 5 ans à les retrouver, en partenariat avec une équipe de chercheurs de l’INRAE. Les obstacles sont nombreux : les oiseaux raffolent de ces petits jardins, les variétés anciennes ont un peu perdu leur résistance à la verse et il faut sélectionner les semences les plus adaptées… Beaucoup d’échecs, mais quelques résultats encourageants : des cultures de seigle et de grand épeautre ont donné un équivalent de plus de 80 quintaux à l’hectare, soit plus du double de la moyenne nationale en bio. Un programme au long cours !

Les jardins de bois

Acheter un bois ou une forêt est extrêmement difficile, alors pourquoi ne pas cultiver son bois-énergie chez soi ? Depuis deux ans nous testons les jardins de bois, des taillis recépés et fertilisés dont les rendements pourraient atteindre 5 fois la production de bois d’une forêt diversifiée classique.

Ré-ensauvagement

Le rewilding invite à laisser des espaces pour la nature sauvage. Nous étudions l’évolution botanique d’un herbage ponctuellement pâturé, dans la durée. Une voie médiane entre une libre évolution radicale et un usage intensif.

La petite île-jardin

Notre petite île a fait l’objet d’une étude conduite plusieurs mois durant par une jeune agronome, Lone. Elle montre le potentiel de ce jardin aquatique, inspiré des anciennes chinampas précolombiennes, qui offre aux légumes des conditions idéales avec la disponibilité de l’eau et de la matière organique. Une solution à explorer pour créer des jardins beaux et productifs, dans un contexte de changements climatiques ?

Tous ces programmes, et d’autres encore, sont à découvrir dans le rapport, disponible sur notre site : https://www.fermedubec.com/wp-content/uploads/sites/8/2023/12/PROGRAMME_RECHERCHE_2022_061223_BDEF.pdf

Charles invité du podcast MÉTAMORPHOSE

Mon amie Anne Ghesquière m’a invité dans son merveilleux podcast, pour parler du toucher qui guérit et de notre prochaine formation de thérapeute psychocorporel. La permaculture nous invite à prendre soin de la terre et des humains, et la résilience a beaucoup à voir avec la manière dont nous soignons notre être intérieur ! J’aime l’idée qu’à la ferme nous explorons de nouvelles manières d’habiter la terre, mais aussi les thérapies du monde de demain. Vous pouvez en découvrir davantage sur toutes les plates formes de streaming et sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=349ukM7gYsk&t=1s

COP 28, réchauffement climatique et micro-agriculture

Vous avez certainement suivi les travaux de la COP 28, qui restera dans les annales comme historique pour… la participation record des lobbyistes en faveur des énergies fossiles ! Il est certain que nous ne prenons pas le chemin d’une réduction rapide et drastique des rejets de carbone. Un tiers de la planète risque de devenir inhabitable dans les décennies à venir… Que faire ? Nous retrousser les manches et cesser d’attendre des solutions qui viennent « d’en haut » ! Nombre de solutions viennent « d’en bas », et notamment d’un sol fertile amoureusement cultivé par des êtres humains conscients. Chacun.e peut créer une petite oasis résiliente, avec une riche terre arable, de l’eau, des arbres et des cultures, et contribuer ainsi à sécuriser notre avenir commun. Rappelons les résultats des recherches menées au Bec Hellouin sur les buttes de culture permanentes : sans une goutte de pétrole elles produisent environ 10 fois plus de légumes par unité de surface que les cultures maraîchères conduites avec un tracteur, et dans le même temps elles stockent jusqu’à plus 10 % de carbone organique par an ! Leur teneur en minéraux bio-disponibles pour les cultures augmente très rapidement aussi. Voilà comment d’anciennes techniques manuelles se révèlent pertinentes pour lutter contre le réchauffement climatique, tout en nourrissant les humains. Il y a de l’espoir je vous dis, mais il faut qu’on s’y mette sans plus tarder !

Je vous souhaite tout le bonheur et l’amour du monde, en cette fin d’année. Réalisez vos plus beaux rêves, la Terre a besoin d’humains qui osent rêver haut et fort !

Ferme du Bec Hellouin, le 15 décembre 2023.
Charles

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